Ce jeudi 27 mars, la Commission européenne annonce "[avoir] conclu [que le] régime français octroyant un soutien à la production d'électricité à partir d'éoliennes terrestres était compatible avec les règles de l'UE en matière d'aides d'État".
Le tarif d'achat français proposé aux producteurs d'électricité à partir d'éoliennes terrestres était menacé par un recours introduit par l'association Vent de Colère et onze autres requérants visant à faire annuler l'arrêté du 17 novembre 2008 qui en fixe les conditions. En mai 2012, le Conseil d'Etat avait demandé à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) de se prononcer sur le statut du mode de financement du surcoût de l'électricité éolienne. La réponse est tombée en décembre 2013 : suivant les conclusions de son avocat général, la Cour a jugé que le mécanisme de soutien français constituait une aide d'Etat.
Le secteur a "une chance de ne pas se retrouver sans tarif d'achat", explique France Energie Eolienne (FEE). En effet, l'association professionnelle garde à l'esprit que, d'ici 15 jours, "Bruxelles doit rendre ses grandes orientations en matière de mécanismes de soutien aux énergies renouvelables [et] la Commission préconise une suppression progressive du tarif d'achat pour les énergies renouvelables les plus matures, dont l'éolien".
"L'horizon s'éclaircit pour la filière éolienne", estime pour sa part le Syndicat des énergies renouvelables (SER), ajoutant qu'"une étape importante pour la filière éolienne en France".
Une aide raisonnable
Si le tarif d'achat éolien terrestre est une aide d'Etat, cela n'implique pas nécessairement son annulation, la Commission européenne pouvant accepter de telles aides sous certaines conditions. En avril 2013, le gouvernement avait donc ouvert des discussions avec la Commission et en octobre, prévoyant l'annulation par le Conseil d'Etat de l'arrêté tarifaire - annulation qui n'est cependant toujours pas prononcée - il avait engagé une procédure de notification formelle du dispositif de soutien incriminé. Ce jeudi, la Commission donne donc son feu vert. Une annonce "accueillie avec soulagement", par le SER.
Concrètement, l'exécutif européen estime que si les producteurs d'énergie renouvelable reçoivent des compensations pour leurs coûts de production additionnels, ces compensations sont conformes aux lignes directrices de l'Union européenne. En particulier, le tarif est établi de telle sorte qu'il n'y ait pas de surcompensation.
"L'enquête de la Commission a montré que les tarifs d'achat compensent uniquement ces coûts additionnels et permettent un taux de rendement raisonnable conforme aux lignes directrices de 2008 sur les aides en faveur de l'environnement", explique l'exécutif européen, qui valorise à 500 millions d'euros par an l'aide apportée au secteur par ce biais.
Les exemptions jugées au regard des futures lignes directrices
En revanche, la Commission se montre moins convaincue par les réductions de contribution au service public de l'électricité (CSPE) accordées aux électro-intensifs, c'est-à-dire aux grands consommateurs d'énergie. "La Commission a ouvert une enquête approfondie afin d'examiner si trois types de réductions sur les surtaxes sur les énergies renouvelables, accordées en France aux grands consommateurs d'énergie, sont conformes aux règles de l'Union européenne en matière d'aides d'Etat", annonce-t-elle. En octobre 2013, elle avait ouvert une enquête similaire à l'encontre de l'Allemagne.
La Commission vise explicitement trois exemptions de CSPE accordées aux électro-intensifs : l'exonération de CSPE accordée aux autoproducteurs sur leur consommation individuelle inférieure à 240 gigawattheures (GWh) par an, le non-paiement de la CSPE lorsque le montant annuel par site de consommation excède 550.000 euros (indexé) et le plafonnement à 0,5% de la valeur ajoutée annuelle pour les sociétés consommant au moins 7 GWh par an.
"Ces trois réductions semblent donner aux grands consommateurs d'électricité un avantage sélectif qui pourrait fausser la concurrence au sein du marché unique", estime la Commission, rappelant que "la possibilité d'octroyer de telles réductions n'est pas prévue dans les lignes directrices de 2008, actuellement en vigueur, sur les aides en faveur de l'environnement".
L'enquête approfondie permettra aux tiers intéressés de fournir à la Commission des informations susceptibles d'aider à mieux comprendre les effets de la surtaxe quant au risque de délocalisation des activités ainsi que l'impact des réductions de cette surtaxe sur la concurrence dans le marché unique, précise l'exécutif européen.
Par ailleurs, la Commission indique que cette affaire pourrait être jugée au regard des futures lignes directrices concernant les aides dans le domaine de l'environnement et de l'énergie pour la période 2014-2020. Celles-ci devraient être adoptées début avril et pourraient "inclure des dispositions permettant l'octroi de réductions pour les grands utilisateurs d'énergie, sous certaines conditions, afin de préserver la compétitivité".