La Commission européenne ouvre la révision des principaux textes en matière de déchets. Objectif : renforcer sensiblement la prévention et le recyclage. Alors que la révision des textes se prépare, le Bureau européen de l'environnement (BEE) a présenté la semaine dernière un rapport (1) synthétisant les gains à attendre d'une politique ambitieuse dans le domaine.
La fédération environnementale qui rassemble 140 ONG européennes, dont le Centre national français d'information indépendante sur les déchets (Cniid), estime qu'"une politique ambitieuse de réduction des déchets et de recyclage peut générer des bénéfices substantiels de réduction de la mise en décharge et des émissions carbonées, d'amélioration du taux de réutilisation et de recyclage des produits, ainsi que des créations d'emplois plus nombreuses".
Permettre un usage efficace des ressources
La Commission entend réviser en 2014 trois directives clés en matière de prévention et gestion des déchets. Il s'agit en premier lieu de la directive cadre sur les déchets de 2008 qui constituait déjà un important effort de synthèse et d'amélioration de la législation européenne établie depuis le milieu des années 1970. Ce texte clarifiait déjà de nombreux points, fixait la hiérarchie des traitements des déchets et établissait des outils de planification nationale en matière de réduction et de gestion des déchets.
Le deuxième texte qui devrait être révisé est la directive de 1994 sur les emballages et les déchets d'emballages. Le travail a débuté avec une proposition de la Commission présentée en novembre 2013 et visant à réduire l'utilisation des sacs plastique, et en particulier les sacs peu ou pas réutilisables dont l'épaisseur est inférieur à 50 microns. Troisième texte à réviser, la directive de 1999 sur la mise en décharges.
Parallèlement, l'Union européenne a lancé en 2013 une grande révision des objectifs européens en matière de déchets (2) . Le but poursuivi par la Commission est d'aligner les objectifs des trois directives sur ceux fixés au travers de la feuille de route de 2011 pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources, de l'initiative sur les matières premières de 2008 et de la stratégie européenne sur l'eau usée et le recyclage.
Le BEE plaide pour une politique ambitieuse
La convergence des objectifs représente un défi compte tenu des "écarts importants en Europe en matière de production de déchets et d'application des directives européennes relatives aux déchets". A ce stade, le rapport du BEE met surtout l'accent sur l'intérêt de la réduction des déchets et l'amélioration du recyclage dans le cadre de la révision des objectifs européens.
Le document s'intéresse en particulier aux effets économiques et environnementaux d'une politique européenne des déchets qui placerait la prévention et la valorisation matière au centre des préoccupations européennes. Parmi les axes d'une telle politique, figurent des objectifs ambitieux de réduction du gaspillage alimentaire, de réutilisation des textiles et du mobilier, et de recyclage. La priorité, selon l'association environnementale, est d'éviter autant que possible la mise en décharge et l'incinération des déchets, même avec valorisation énergétique. Réduction des déchets, réutilisation des produits et recyclage des matières doivent être les trois priorités.
Par ailleurs, une taxe incitative pour les biens recyclés ou réutilisés, des taxes sur les produits mis en décharge, un système de tarification incitative, et un renforcement de la responsabilité du producteur sont autant d'outils disponibles pour mettre en œuvre une politique ambitieuse.
Pour cela, le BEE propose d'évaluer les différentes options à partir d'indicateurs relatifs à l'utilisation des matériaux, des sols et de l'eau et aux réductions des émissions de CO2.
Sur le plan de l'emploi, une telle politique permettrait de créer jusqu'à 750.000 emplois d'ici 2025 et jusqu'à 867.000 d'ici 2030. Le scénario "modeste" créerait pour sa part 635.000 et 710.000 postes d'ici 2025 et 2030, selon le BEE.
Le rapport estime à plus de 415 millions de tonnes équivalent CO2 (MtCO2eq) d'ici à 2030 la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) d'une politique ambitieuse. Les émissions évitées représenteraient quelque 85 MtCO2eq de GES grâce à la lutte contre le gaspillage alimentaire, 31 MtCO2eq par le biais du réemploi des textiles et produits et plus de 303 MtCO2eq de GES grâce au recyclage.
Par ailleurs, la réduction du gaspillage alimentaire ainsi que la réutilisation des textiles permettraient des économies de ressources agricoles substantielles. D'ici 2030, 61 millions de litres d'eau, 1 million de tonnes d'engrais et de pesticides et 57.000 km2 de terres cultivées seraient économisés.