Interpol, l'organisation internationale de police criminelle, a découvert 21 annonces de vente illicite de produits issus de la faune sauvage (rhinocéros, éléphants ou tigres) en danger critique d'extinction, sur le "Darknet", réseau virtuel parallèle à l'Internet inaccessible publiquement,décentralisé et crypté.
Les recherches se sont déroulées entre décembre 2016 et avril 2017 et sont remontées jusqu'à 2015, précise Interpol dans son étude rendue publique le 15 juin. Cette étude a été financée par le Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw), le Département d'Etat des Etats- Unis et l'African Wildlife Foundation (AWF).
15 annonces ont proposé des produits à base de corne de rhinocéros (1) , 8 pour de l'ivoire (2) et 3 présentant des parties de tigre (3) sur le Darknet, un réseau internet alternatif "surtout utilisé pour de l'échange de fichiers illégaux", a précisé l'Ifaw. "De nombreuses espèces menacées n'étant pas prises en compte lors de cette étude, les chiffres sont sans doute bien plus importants que ceux annoncés". L'étude a également révélé que la majorité des transactions se faisait en crypto-monnaie, système de monnaie électronique, n'ayant pas de support physique.
Le rapport explique que les trafiquants d'espèces sauvages sont susceptibles d'être attirés par le Darknet en raison de son anonymat et de ses mécanismes de sécurité rigoureux, les vendeurs maîtrisant déjà la technologie de cryptage, les instruments financiers et les méthodes de communication couramment utilisées dans cet espace anonyme. "Les trafiquants chercheront toujours à identifier de nouveaux espaces pour tirer profit de leurs activités illicites et le Darknet ne fait pas exception", a déclaré David Higgins, directeur du programme de sécurité environnementale d'Interpol.
Renforcer les législations
"Afin d'aider à protéger la faune sauvage et notre biodiversité universelle, nous devons veiller à ce que l'application de la loi dans les pays membres d'Interpol bénéficie du soutien et des ressources nécessaires pour s'attaquer à la criminalité faunique sur les marchés physiques comme virtuels", a ajouté M. Higgins.
"L'utilisation limitée du Darknet en tant que "place de marché"" pour les produits fauniques pourrait s'expliquer, ajoute le rapport d'Interpol, par les "faibles risques judiciaires" encourus par les trafiquants d'espèces sauvages pouvant ainsi trafiquer «au grand jour», par les prix élevés et incohérents, par la crainte des acheteurs d'être victimes de fraudes et par les difficultés liées aux expéditions. "La croissance du e-commerce et l'intérêt généré par cette criminalité démontrent la nécessité pour les responsables de l'application des lois de passer au peigne fin le Darknet lors des enquêtes sur les crimes liés aux espèces sauvages".
"L'étude d'Interpol sur le Darknet nous fournit énormément de pièces du puzzle. Elle nous montre que ces sites clandestins peuvent être une menace pour la faune sauvage, nécessitant de la vigilance dans la répression. Cela nous montre également que les mesures prises ensemble par les autorités et les sociétés en ligne n'ont pas suffi à chasser complètement les trafiquants des plateformes légales ou du Darknet", a déclaré Tania McCrea-Steele, responsable du projet international de lutte contre la criminalité faunique d'Ifaw.
En septembre 2016, les 183 signataires de la Convention sur le commerce international des espèces menacées (Cites) ont adopté une décision visant à renforcer la lutte contre le commerce illégal de la faune sauvage sur internet. "Les gouvernements français, tchèques et chinois ont en plus ajouté des dispositions à leur législation sur la faune sauvage afin de répondre aux menaces du trafic illégal en ligne, avec le Royaume-Uni", a rappelé Tania McCrea-Steele, en se félicitant de "ces évolutions".