En matière d'économie circulaire, la principale modification proposée par le Gouvernement concernait la refonte de la sortie du statut de déchet (SSD). Pour l'essentiel, l'exécutif souhaitait inscrire dans la loi la SSD « implicite », c'est-à-dire autoriser la sortie du statut de déchet (SSD) dès lors qu'un exploitant en prend la responsabilité. Il souhaitait aussi limiter le recours aux arrêtés de sortie du statut de déchet (aujourd'hui indispensables).
Les sénateurs ont suivi le Gouvernement sur le premier volet. En revanche, le texte adopté jeudi dernier maintient la priorité donnée à la fixation de critères de sortie du statut de déchet par arrêté (l'alinéa rendant facultatifs les arrêtés SSD a été supprimé). La Haute Chambre propose aussi de créer des territoires d'industrie circulaire et a renforcé le dispositif d'amendes proposé par l'exécutif pour sanctionner les exportations illégales de déchets.
À l'issue de la première lecture au Sénat, le projet de loi prévoit qu'une substance (ou un objet) élaboré dans une installation de production qui utilise des déchets comme matière première n'a pas le statut de déchet quand cette substance est similaire à celle qui aurait été produite sans avoir recours à des déchets. En clair, les déchets utilisés perdraient leur statut de déchet si le produit final est semblable à un produit fabriqué avec des matières premières classiques. Cela, à condition que l'exploitant de l'installation de production « respecte les conditions [prévues pour la sortie du statut de déchet] ».
Initialement, le Gouvernement proposait que la responsabilité de la SSD incombe au préparateur du déchet utilisé pour fabriquer la substance ou le produit, ou au producteur de la substance ou du produit. Les sénateurs n'ont retenu que le fabricant de la substance ou du produit. De plus, la rédaction gouvernementale prévoyait que le préparateur ou le producteur soit « responsable du respect [des] conditions [de SSD] », alors que le texte sénatorial évoque simplement le « respect » de ces conditions, sans notion de responsabilité.
Statut de sous-produit
Le projet de loi revient aussi sur les contours du statut de déchet pour les plateformes industrielles (telles que définies par l'article L. 515-48 du code de l'environnement). Le Gouvernement proposait que, sur ces plateformes, aujourd'hui au nombre de quatre, les résidus de production ne prennent pas le statut de déchets s'ils sont réemployés sur le site. Les sénateurs ont retenu l'idée, tout en précisant que ces résidus prennent le statut de « sous-produit ». Le Gouvernement voulait « [créer] une présomption de non-application du statut de déchet pour des résidus de production produits dans une plateforme industrielle, sans pour autant faire référence à la notion de "sous-produit" », ont-ils expliqué, jugeant que la disposition proposée par le Gouvernement « [semblait] à cet égard contraire au droit de l'Union européenne ».
Ces conditions sont au nombre de cinq : l'utilisation est certaine, la substance ou l'objet peuvent être utilisés directement, le sous-produit fait partie intégrante d'un processus de production, il répond aux prescriptions relatives aux produits, à l'environnement et à la protection de la santé prévues pour l'utilisation ultérieure, et il n'aura pas d'incidences globales nocives pour l'environnement ou la santé humaine.
Création de « territoires d'industrie circulaire »
Les sénateurs ont aussi ajouté un nouvel article au projet de loi afin de créer des « projets territoriaux d'industrie circulaire ». Ces projets, défendus par le groupe Écologiste - Solidaire et Territoires, s'inspirent des projets alimentaires territoriaux. L'objectif est de « définir un cadre législatif qui permettra d'apporter au-delà du réglementaire, de l'économique et du changement de comportement, un environnement incitatif au développement de l'industrie circulaire », s'expliquent les sénateurs.
Le texte prévoit que ces projets « répondent à l'objectif de structuration de l'économie circulaire et de mise en œuvre d'un écosystème industriel territorial ». Élaborés « avec l'ensemble des acteurs d'un territoire », ces projets peuvent être lancés à l'initiative de l'État, des collectivités, d'associations ou d'entreprises. Ils prennent la forme d'un contrat entre les partenaires engagés. Un réseau sera chargé de suivre leur déploiement, de mettre en avant les bonnes pratiques et de construire des outils méthodologiques.
Renforcement du dispositif d'amendes
Enfin, le Gouvernement voulait sanctionner d'amendes administratives les exportations irrégulières de déchets, en créant un nouveau régime de sanction. Les sénateurs ont essentiellement apporté deux modifications au projet déposé par l'exécutif : les amendes pourront être infligées trois ans après le constat du transfert illicite (contre un an dans le texte initial) ; leur montant peut atteindre cinq fois le coût de traitement des déchets concernés (contre trois fois ce coût initialement).