Le pôle nord a connu un climat subtropical il y a 55 millions d'années. C'est ce que révèlent les premières analyses des carottes de glaces récoltées par la mission ACEX.
Partie de Tromsö en Norvège le 8 août dernier, l'expédition s'est terminé le 14 septembre.
L'équipe de cette mission, qui comprend des scientifiques de 8 pays, vient de forer jusqu'à 400 m de profondeur sous le plancher océanique, sous une profondeur d'eau de 1300 m. Les forages les plus profonds obtenus à ce jour dans cette région n'étaient que de 16m. Selon Jan Backman, de l'Université de Stockholm, l'un des deux chefs de la mission, « ces carottes de glace remontent à une époque où il n'y avait pas de glace sur la planète. Elles vont nous apporter une énorme quantité d'informations sur le climat de l'Arctique. Elles vont nous dire comment le climat a changé, et peut-être pourquoi ».
Les premières analyses, réalisées en cours de mission, indiquent que les carottes contiennent des microfossiles de plantes et d'animaux caractéristiques d'un climat subtropical et d'un environnement de mer peu profonde. Ces algues fossiles révèlent que les eaux de l'océan Arctique étaient à cette époque beaucoup plus chaudes (environ 20°C). La température actuelle est de l'ordre de -1,5°C. Ces fossiles datent d'une période connue comme le maximum thermique du Paléocène-Eocène, brève période datée d'environ 55 millions d'années, au cours de laquelle un épisode de climat très chaud a créé un effet de serre naturel provoquant un apport massif de carbone dans les eaux marines et dans l'atmosphère. La quantité de carbone atmosphérique aurait alors été de 2 à 3000 ppm contre 380 ppm aujourd'hui.
En novembre, une équipe élargie de scientifiques se retrouvera à l'Université de Brême, en Allemagne pour décrire et échantillonner les carottes récoltées. Des travaux en laboratoire seront nécessaires pour mieux comprendre ces changements radicaux du climat de l'Arctique. Deux équipes du CNRS sont impliquées dans ces études : le CEREGE (Centre Européen de Recherche et d'Enseignement des Géosciences de l'Environnement) à l'Université d'Aix Marseille III, et le laboratoire EPOC (Environnements et Paléoenvironnements OCéaniques) à l'Université de Bordeaux I.
Grâce à l'analyse de carottes de sédiments forées jusqu'à 400m de profondeur sous le plancher océanique, les chercheurs vont pouvoir réévaluer l'histoire de la formation du bassin arctique.
Pour information :
L'expédition en Arctique est conduite dans le cadre du programme international de forages océaniques IODP (Integrated Ocean Drilling Program). Les opérations, dont le coût s'élève à 12,5 millions de dollars, ont été financées par un consortium de partenaires européens, ECORD (European Consortium for Ocean Research Drilling), dont la gestion est assurée par l'INSU (Institut national des sciences de l'univers) du CNRS. Un groupement d'institutions européennes, ESO (ECORD Science Operator) est responsable de l'organisation des navires, de la surveillance de la glace et des opérations scientifiques.
Le programme international IODP a pour mission de forer le plancher océanique à des fins de recherche dans les domaines suivants : histoire des bassins océaniques, nature du changement climatique, composition et structure de la croûte océanique, la vie sous le plancher océanique. IODP procède aussi à des avancées technologiques pour mener à bien des campagnes de forages dans des régions inaccessibles par n'importe quelle autre technologie.
ECORD représente et finance les forages océaniques à un niveau européen.
ESO est un groupe d'institutions scientifiques qui conduisent des opérations de forage pour ECORD. Coordonné par le British Geological Survey, ECORD inclut l'Université de Brême, le Consortium de pétrophysique européen (composé par les Universités de Leicester, Montpellier, Aix-la-Chapelle et Amsterdam) et le Secrétariat de Recherche Polaire Suédois.
Soruce : CNRS