Ce document propose 164 mesures à mettre en œuvre dans le domaine de la santé environnementale afin d'éviter ou d'atténuer les crises de santé publique dans les Etats membres de l'Union Européenne. Ces mesures concernent principalement les maladies liées à la pollution chimique comme les cancers, la stérilité, les malformations congénitales, l'obésité, les maladies du système nerveux et les allergies…
Parmi ces mesures, certaines concernent le retrait du marché des substances chimiques Cancérogènes, Mutagènes et Reprotoxiques (CMR) comme le formaldéhyde, certains phtalates (DEHP), le bisphénol A, le cadmium et le mercure, ainsi que leurs dérivés respectifs. Elles impliquent donc le renforcement du projet de règlement européen REACH (Règlement sur l'Enregistrement, l'évaluation et l'Autorisation des substances CHimiques) qui devrait être examiné en deuxième lecture par le Parlement européen dans un mois.
Rappelons que le projet de législation REACH a été présenté en 2001 et publié en octobre 2003 par la commission dans le but de renforcer les connaissances sur les effets éventuels des substances chimiques sur la santé et l'environnement, et de permettre une meilleure gestion des risques liés à leur production et leur utilisation éventuelles. Concrètement, les fabricants et importateurs de substances chimiques produites ou importées à plus d'une tonne par an et commercialisées depuis plus de 20 ans (environ 30 000 molécules) devront enregistrer ces substances auprès d'une agence centrale et fournir des données sur les caractéristiques et les usages de celles-ci. Cette information sera évaluée, et les substances les plus dangereuses dîtes extrêmement préoccupantes seront sujettes à une procédure d'autorisation. Environ 1500 substances chimiques sont susceptibles de passer par cette procédure d'autorisation.
Pourtant, malgré l'enjeu, le texte voté en première lecture à l'automne 2005, a subi plusieurs modifications qui l'on affaibli. En revanche, en octobre dernier, les eurodéputés ont réintroduit dans le texte le principe de substitution ainsi que le devoir de prudence (duty of care) qui permet de mieux responsabiliser les producteurs chimiques quant à la sécurité de leurs produits.
D'autres mesures indiquées dans l'Appel de Paris préconisent le retrait du marché des produits organobromés en raison de leurs très grandes réactivités avec l'ozone et donc de la possibilité d'aggraver la disparition de la couche d'ozone stratosphérique. Certaines concernent encore les modalités d'autorisation de mise sur le marché des pesticides, additifs alimentaires et cosmétiques selon une procédure réglementaire comparable à celles utilisées pour les médicaments.
Les scientifiques demandent également la réduction programmée de l'utilisation des pesticides, le développement de l'agriculture biologique, et, à ce titre, une réforme de la politique agricole commune.
Outre la nécessité d'orienter le 7ème programme cadre de la communauté européenne pour la recherche et le développement technologique en direction de l'écologie et de la prévention des maladies environnementales, et non pas seulement en direction de la génétique et des traitements, les scientifiques prônent la création d'une nouvelle discipline médicale : la médecine environnementale.
Rappelons que l'Appel de Paris* a été lancé en mai 2004 par 76 personnalités françaises et étrangères et notamment du cancérologue Dominique Belpomme à l'origine de cette initiative, pour combattre la pollution chimique et les maladies liées à l'environnement. Il a recueilli l'adhésion et l'appui de personnalités éminentes telles que les deux Prix Nobel de Médecine français, les Prs François Jacob et Jean Dausset, de nombreux membres des Académies des Sciences et de Médecine parmi lesquels les Prs Jean Bernard, Yves Coppens, François Gros, Lucien Israel, Luc Montagnier, des personnalités médiatiques, humanistes comme Nicolas Hulot, Albert Jacquard, Boutros Boutros-Ghali (ancien secrétaire général de l'ONU).
Aujourd'hui, un millier de scientifiques internationaux, 1.500 ONG et 200.000 citoyens ont apporté leur signature à l'Appel. Il est signé par le Conseil national de l'Ordre des médecins ainsi que par l'ensemble des conseils nationaux de l'ordre des médecins et syndicats médicaux des 25 Etats membres de l'Union européenne regroupés au sein du Comité permanent des médecins européens représentatif des deux millions de médecins européens. L'objectif est de récolter, à l'échelle européenne, un million de signatures pour avoir du poids dans le processus décisionnel européen et les inciter à agir.
*http ://appel.artac.info