En juillet dernier, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, annonçait que la création d'une Union européenne de l'énergie serait l'une des priorités de son mandat. Les récentes tensions géopolitiques, notamment en Ukraine, ont en effet pointé du doigt, une fois de plus, la forte dépendance de l'UE aux importations de gaz et de pétrole, et ont fait craindre aux Etats membres des ruptures d'approvisionnement.
Diversifier l'approvisionnement énergétique : une nécessité
Quelle position pour la France ?
Le 23 mars, le secrétaire général d'ERDF, Michel Derdevet, a remis à François Hollande les conclusions d'une mission qu'il lui avait confiée sur la politique européenne en matière de réseaux énergétiques. Le rapport prône une réappropriation par l'Europe des enjeux de sécurité d'approvisionnement et une coordination renforcée des politiques nationales. Il milite pour la création de gestionnaires de réseau de transport européens, dont RTE pourrait être le pivot, puisqu'il comprend 40% des interconnexions européennes. Mais selon lui, les réseaux de distribution ne doivent pas être oubliés : il faut accroître la coopération transfrontalière entre les gestionnaires de ces réseaux. Enfin, les freins réglementaires doivent être levés et les financements facilités.
Elle étudiera également les possibilités d'agréger la demande, sur une base volontaire, "en vue d'effectuer des commandes collectives de gaz au cours d'une crise et lorsque les Etats membres sont dépendants d'un fournisseur unique". C'est notamment le cas de six Etats membres (3) . Enfin, l'exécutif européen souhaite désormais être informé précocement des discussions d'accord entre un Etat membre et un pays tiers, "afin d'assurer une meilleure évaluation ex ante de la compatibilité de ces accords avec, notamment, les règles du marché intérieur et les critères de sécurité de l'approvisionnement". La Commission fera des propositions pour accroître la transparence des accords commerciaux de fourniture de gaz.
La diversification des ressources passe aussi par un accroissement des productions européennes : énergies renouvelables, mais aussi énergies fossiles, conventionnelles et non-conventionnelles "pour les Etats membres qui en font le choix", souligne la Commission. "La production de pétrole et de gaz à partir de sources non conventionnelles en Europe est une option, à condition que les questions d'acceptation du public et d'impact environnemental soient prises en compte".
La Commission souligne également l'importance de diversifier l'approvisionnement en combustible nucléaire. Elle renforcera ses exigences sur le sujet.
Marché intérieur de l'énergie : vers une meilleure coordination
La Commission proposera un nouveau design du marché européen de l'électricité en 2015 et des propositions législatives en 2016. Mais "l'application stricte de la législation existante" (paquet sur le marché intérieur de l'énergie) est un prérequis, "en particulier en ce qui concerne le dégroupage et l'indépendance des régulateurs", insiste-t-elle.
La Commission souhaite augmenter l'interconnexion entre les Etats membres (4) , pour atteindre 10% minimum de leur capacité installée de production d'électricité d'ici à 2020, pour un investissement de 40 Md€. "Il y a actuellement douze Etats membres (5) qui ne sont pas suffisamment connectés au marché de l'électricité de l'UE", souligne-t-elle. L'objectif d'interconnexion pourrait être porté à 15% d'ici 2030, à condition que cela ne demande pas d'investissements trop importants.
Il faudra également améliorer la coordination des capacités de production d'électricité, notamment renouvelable, au niveau régional, ainsi que les capacités de stockage et la flexibilité. La Commission proposera "des règles plus élaborées pour les échanges transfrontaliers d'énergie et proposera des mesures appropriées pour encourager une meilleure intégration de la production d'électricité d'origine renouvelable dans le marché de l'électricité au sens large". Elle souhaite renforcer la gouvernance, et notamment les pouvoirs de l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie (Acre), afin qu'elle puisse "superviser efficacement le développement du marché intérieur de l'énergie et les règles de marché correspondantes".
Enfin, la Commission fera des propositions pour améliorer l'efficacité énergétique dans les bâtiments (initiative sur les financements intelligents), les transports (paquet transport routier), décarboner l'économie, atteindre l'objectif de 27% d'énergies renouvelables en 2030 (nouveau paquet énergies renouvelables en 2016-2017) et accélérer la recherche (plan stratégique en 2016).