Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Autonomie énergétique en milieu urbain : un parcours semé d'embûches

Peu nombreuses en France, les communautés énergétiques relèvent d'initiatives municipales qui se heurtent à la complexité technique des infrastructures et à un contexte réglementaire peu évolutif.

Energie  |    |  A. Sinaï
Autonomie énergétique en milieu urbain : un parcours semé d'embûches
Actu-Environnement le Mensuel N°422
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°422
[ Acheter ce numéro - S'abonner à la revue - Mon espace abonné ]

« La notion d'autonomie énergétique se définit comme la capacité d'un système local d'acteurs à déterminer les conditions de production, d'approvisionnement et de circulation énergétique d'un territoire donné », précise Fanny Lopez, historienne de l'architecture et enseignante à l'École d'architecture de la ville et des territoires de Marne-la-Vallée, lors d'un séminaire organisé par l'Institut Paris Région, le 13 janvier.

Mais l'autonomie énergétique ne va pas de soi : jusqu'où aller dans la complexité du fonctionnement d'un quartier urbain ? Plusieurs projets collectifs ont essuyé les échecs, confrontés à la complexité technique des infrastructures ou à des acteurs plus ou moins enclins à bouleverser l'ordre des choses. Ainsi le projet « démonstrateur », mené dans le secteur ouest de Clichy-Batignolles, sur une ancienne friche ferroviaire de 50 hectares, n'a pas tenu ses promesses.

Complexité numérique aux Batignolles

Cet écoquartier parisien compte 3 000 habitants et couvre 200 000 m2 de surfaces de logements, bureaux, commerces et équipements publics. L'objectif était de construire des bâtiments peu consommateurs, de relocaliser la production et l'approvisionnement énergétique à partir d'une boucle de chaleur, en l'occurrence une géothermie, exploitée par Eau de Paris, et un appoint, fourni par le réseau de chaleur centralisé de la Compagnie parisienne du chauffage urbain (CPCU). Au moment de la livraison du secteur Est, en 2016, « il y a eu un décalage entre les ambitions affichées et la réalisation concrète », analyse Lucas Spadaro, qui mène une étude de cas sur le sujet. Les consommations étaient plus élevées que prévues.

D'où l'expérimentation Cordees (CoResponsability in District Energy Efficiency and Sustainability), menée entre 2016 et 2019, financée à 80 % par un programme européen, pour un coût total de 5,4 millions d'euros. Les techniques de l'information et de la communication (TIC) devaient améliorer la gestion des services urbains sur ce territoire. Les acteurs se sont regroupés en consortium, Paris Métropole aménagement et le pôle innovation de la Ville de Paris, appuyés par une entreprise spécialisée, EMBX, et Mines Paris Tech, pour utiliser les données numériques. L'objectif était de suivre finement les consommations énergétiques et de concrétiser les ambitions annoncées. Une infrastructure numérique et des services destinés aux usagers pour les impliquer dans la maîtrise énergétique du quartier ont été installés dans la partie ouest du quartier. En outre, la mise en place de l'infrastructure numérique s'est heurtée à des difficultés réglementaires, liées à l'usage des données personnelles.

L'autre limite à l'implantation de ce projet a été la prise en charge fragmentée entre les concepteurs des infrastructures techniques et ceux qui en ont l'usage. Les acteurs qui conçoivent et créent les conditions techniques quittent le projet d'aménagement, quand ceux qui prennent possession du quartier arrivent progressivement. Or « les performances énergétiques réelles dépendent aussi bien de la qualité technique des infrastructures urbaines que des usages ultérieurs qui en seront faits », analyse M. Spadaro.

Un portage politique interrompu en Yvelines

Dans la commune du Perray-en-Yvelines, ville de 7 000 habitants dans le sud du département, des projets d'autoconsommation, à de plus petites échelles que le quartier des Batignolles, ont pu voir le jour grâce à un portage municipal dynamique. Conseiller municipal entre 2008 et 2020 du Perray-en-Yvelines, Gervais Lesage, consultant en innovation numérique, était bien outillé pour lancer dans cette commune une des premières expérimentations de réseau local.

“ Il y a une forte demande d'accompagnement sur ce sujet complexe qui va de pair avec l'aménagement des territoires ” Gervais Lesage, ancien élu du Perray-en-Yvelines
En 2014, la ville du Perray-en-Yvelines fait ses premiers pas en autoconsommation : elle installe 72 panneaux photovoltaïques et deux batteries, pour une puissance de 18 kWc, soit 15 % de la consommation annuelle du site de la Mare aux loups, constitué de neuf bâtiments municipaux. « On apprend en faisant », commente M. Lesage, qui recommande de « faire des petits projets tout en amenant les habitants à plus de sobriété ».

En 2016, est créée la société anonyme Le Perray Energies dans le but de favoriser une production communale d'énergies renouvelables. En 2018, 68 panneaux photovoltaïques sont déployés sur la station d'épuration. En 2019, le centre technique municipal devient lieu de distribution d'électricité dans la ville : 630 panneaux photovoltaïques produisent 200 000 kW/h par an destinés aux commerces, écoles et gymnase de la ville, pour un budget de 400 000 €. Les habitants ont la possibilité d'adopter un panneau en ligne par le biais du financement participatif.

En 2020-2021, l'écoquartier en projet de la Perche aux mares a l'ambition de se doter de 4 500 panneaux, pour une puissance installée de 1,3 MWc. Mais le changement d'équipe municipale, en 2020, interrompt le projet. « On n'a pas pu impliquer les habitants autant qu'on aurait voulu. Mais on a senti l'intérêt de la population. Il y a une forte demande d'accompagnement sur ce sujet complexe qui va de pair avec l'aménagement des territoires », commente M. Lesage.

Bousculer « l'ordre électrique »

Les expérimentations du quartier Batignolles-Ouest à Paris et du Perray-en-Yvelines montrent que le succès des dispositifs d'autoconsommation repose sur deux facteurs : l'accompagnement de l'usager et l'animation durablement portée par une collectivité locale opératrice. En France, en 2021, il n'y a presque pas de réseaux électriques privés résidentiels, même si, sur ce sujet, la réglementation européenne pourrait évoluer.

Une autre raison explique cette situation : selon Fanny Lopez, l'autonomie bouscule « un ordre électrique » français centralisé. Dans d'autres métropoles, comme à New York, la part des microréseaux est importante. De son côté, Londres s'est fixé dans le plan Greater London 2014 d'atteindre 25 % de la consommation électrique de la ville par des microréseaux. Le projet Repowering London mobilise les habitants de grands ensembles sur des projets d'autoconsommation. « Qu'est-ce que ça donnerait si on inversait la hiérarchie du système électrique ? Si le grand réseau devenait un système de secours et qu'on essayait d'optimiser les capacités productives des régions ? » interroge Fanny Lopez. Un véritable renversement de perspective.

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

BM 25 - Balise portable de détection multi-gaz Teledyne Gas and Flame Detection
OLCT 20 - Détecteur fixe de gaz Teledyne Gas and Flame Detection